- [Page 8] Afin que la croissance de n’importe quel indicateur recule, les forces qui le contraignent doivent être plus grandes que celles qui l’entretiennent. Or les forces qui entretiennent la croissance sont actuellement plus importantes, car le monde est encore relativement riche, et ses habitants et leurs institutions partagent encore le même désir d’une croissance toujours plus forte. [...] Une fois que le déclin se sera généralisé, les forces qui s’évertuent à entretenir la croissance faibliront, de même que celles qui s’y opposent. Ainsi, c’est la génération actuelle qui subira les traumatismes majeurs dus aux diverses forces qui causeront le déclin de la population et du capital productif.
Les Limites à la croissance (dans un monde fini) - ÉDITION SPÉCIALE 50 ans
- [Page 12]Aucun système de gouvernance ne peut créer un avenir meilleur s’il est dominé par des individus égocentriques, corrompus, sans vision à long terme, ou ignorants.
- [Page 12] Il y a cinquante ans, je pensais naïvement que notre rapport motiverait les dirigeants à adopter une vision à plus long terme. De toute évidence, il a échoué sur ce point.
Cinquante ans plus tard, le chercheur étasunien n’hésite plus à affirmer que l’effondrement a déjà commencé. (Source rfi.fr le 19/08/2022)
[Archive RTS] Jacques Piccard - Une fin du monde pour 2030 ? (1972)
En 1972, Jacques Piccard, océanographe, s'appuyant sur le rapport Meadows, prévoyait une grande catastrophe humaine vers les années 2030 :
À l’époque, pour que la situation se stabilise dans les années 2000, la simulation informatique obtenue avec le modèle World3, calculait qu'il aurait fallu réduire les investissements de 40%, réduire la pollution de 50%, l’exploitation de matières premières de 75% et la production alimentaire de 20%. Malheureusement, ces objectifs n’ont pas été atteints. Sans ce changement radical, la simulation prévoyait aux environs de 2030, une chute brutale de la population d’à peu près les deux tiers.
Ces deux tiers, c’est un chiffre qu’on retrouve dans toutes les grandes catastrophes naturelles chez les animaux […] à peu près les deux tiers de la population disparaissent au moment où il y a eu un excès de population, une explosion de la population.
Issues of Sutainability - YouTube Interviews with Dennis Meadows 2017
Un extrait en particulier a été repris et diffusé sur youtube par différentes personnes, mais avec souvent une interprétation erronée des propos de Meadows (pour connaitre plus précisément son parcours, voir un article précédent : Dernière alerte, 40 ans après "Les limites à la croissance". (2013).)
Ce passage vidéo contient en tout cas des chiffres assez glaçants, il est donc suggéré de choisir si on veut passer cette étape :
"Mur écologique" actuel, par l'historien François Jarrige (2025)
En préalable à la vidéo avec Meadows, voici un extrait de l'interview de François Jarrige en avril 2025, qui interroge les 2 "solutions" ou voies possibles : soit une forme de décroissance voulue, soit le technosolutionnisme, notamment avec l'IA.
(Extrait : de 33min39 à 39min27)
Cliquer pour charger la vidéo Sur youtube (avec traqueurs)
Interview Dennis Meadows (extrait) | Traduction en français
↓ Dérouler le texte pour le faire apparaître. ↓
Puisque tu peux couper ce que tu ne veux pas, je peux parler franchement.
Je ne m’attends pas à ce qu’on évite l’effondrement. Je ne sais pas à quoi il ressemblera. Il y a plein de scénarios possibles — mais au fond, on ne sait pas, et peut-être qu’on ne peut pas savoir.
Un volcan énorme pourrait entrer en éruption demain en Indonésie, faisant chuter la production agricole mondiale de 40 à 50 % pendant cinq ans. Est-ce déjà arrivé ? Oui. Plusieurs fois. Ce qui est arrivé avant peut arriver encore. Ou ce sera peut-être une épidémie. Je ne sais pas sous quelle forme ça se manifestera. Mais d’une façon ou d’une autre…
Nous sommes maintenant bien au-delà des niveaux de population et de consommation que la Terre peut soutenir. Et je sais que ça devra redescendre. Je ne pense pas qu’on pourra éviter ça. Ce que j’espère — ce que je souhaite vraiment — c’est que ce déclin puisse se faire de manière civilisée. Pas forcément paisible, au sens de « tout le monde est content », mais civilisée au sens où les conflits sont réglés sans violence ni coercition.
C’est mon espoir. Je crois que la Terre peut supporter peut-être un ou deux milliards d’habitants, selon la liberté qu’on veut garder et la consommation matérielle qu’on veut avoir. Si on veut plus de liberté et plus de consommation, alors il faut moins de monde.
Peut-on maintenir huit ou neuf milliards d’habitants ? Peut-être, mais seulement sous une dictature forte, soi-disant intelligente. Le problème, c’est que les dictatures intelligentes n’existent pas. Elles finissent toujours par être idiotes.
Idéalement, on aurait un monde où les gens partageraient cette expérience — où ce n’est pas juste une poignée de riches qui essaient de forcer tout le monde à gérer les conséquences. Voilà ce que j’espère.
J’admets, ce sont des espoirs assez pessimistes. Mais c’est ce que je vois devant nous.
Réponse à l'"interprétation erronée" de certains sur youtube : Meadows précise sa pensée durant cette interview et confirme que 7-8 milliards de personnes vivant aux standards occidentaux ne serait pas soutenable pour la planète. Il ne propose évidemment aucune solution pour réduire la population. Il prône plutôt la décroissance de la consommation. De même, il est déjà intervenu dans des conférences à Davos, mais pour autant, il ne fait pas partie du WEF.
Pourquoi afficher ce chiffre s’il est aussi glaçant ?
Et pour les Occidentaux qui pensent que l’extrême-droite pourrait être une réponse pour les gens du peuple face à l'effondrement, Arthur Keller a une réponse très simple à cela : l’idée du repli sur soi, « ça ne marchera pas ! » (cf dans l'article : "Quelques passages notables").
De même, la surpopulation n'est pas le premier problème, contrairement à ce qui est pointé par M. Sarkozy pour l'Afrique et le Nigéria en particulier, car le niveau de surconsommation concerne les pays développés : le propos de M. Sarkozy est une "manipulation" qui cache la réalité du problème.
Démographie : je pense que ce n'est pas le problème. Un seul Elon Musk fait plus de dégâts à lui seul, que tout le continent africain réuni.
Pour contextualiser ce chiffre avancé par Meadows :
Selon un rapport des Nations Unies, la population des régions développées reste largement inchangée à environ 1,3 milliard de personnes en 2025. Cela représente environ 15-17 % de la population mondiale totale, qui est estimée à environ 8 milliards de personnes en 2025.
Certains seraient donc tentés de mettre en relation ce chiffre de 1,3 milliard, avec les 1 à 2 milliards annoncés par Meadows, et donc dans une évidente indifférence pour le restant du monde, de ne pas se sentir concernés. Cependant, pour ceux qui pensent qu’une réduction majeure de la population toucherait par conséquent, surtout les contrées les moins développées, non seulement cela ne changerait rien car les plus grands pollueurs sont issus des pays développés, mais en plus, il s’agit de rappeler aux personnes vivant "à la moderne", l’énorme dépendance aux travailleurs du monde entier (agriculture, extraction de minerais, transformation et fabrication des objets de consommation, etc.) et donc la dépendance à cette très longue chaîne d’approvisionnement, de tout ce qui fait la vie "à la moderne".
Le système économique mondial actuel est d'une grande complexité, et donc aussi d'une grande fragilité, car une défaillance infime peut suffire (exemple : Pénurie de puces électroniques en 2021).
De même, un autre mot est prononcé en 2011 par Coline Serreau, qui résonne particulièrement en 2025 : "génocide"...
Nota bene : il ne s'agit en aucun cas de complotisme, mais, si certains en veulent "toujours plus", forcément d'autres en auront toujours moins, voire plus assez pour vivre...
Il serait peut-être temps d'entendre le message, mais à une large échelle, plutôt que de garder... la tête dans le sable... 🙄🙂
Speed Bump by Dave Coverly for October 12, 2018.
Espérer le meilleur et se préparer au pire, c’est la règle.
Sans même ouvrir ce "contenu sensible", il est aisé, pour les gens du peuple, de comprendre les implications de la conclusion du rapport Meadows, une croissance illimitée dans un monde limité, est mathématiquement impossible, dans un monde où les puissants ne s'arrêteront pas dans leur logique grisante du "toujours plus"...
Publié le 23/08/2025
Recalibrage des limites à la croissance: une mise à jour du modèle World3 (2023)
Il s'agit d'un article en anglais publié pour la première fois le 13 novembre 2023 : Recalibration of limits to growth: An update of the World3 model - https://doi.org/10.1111/jiec.13442 (Cologne Institute for Renewable Energy, TH Köln – University of Applied Sciences, Köln, Germany) PDF.
Résumé Après 50 ans, le débat sur l'étude Les limites de la croissance (LtG) est toujours d'actualité. Cet article recalibre le modèle World3-03 de 2005. Les paramètres d'entrée sont modifiés afin de mieux correspondre aux données empiriques sur le développement mondial. Une méthode itérative est utilisée pour calculer et optimiser différents ensembles de paramètres. Cet ensemble de paramètres amélioré donne lieu à une simulation World3 qui montre le même dépassement et le même mode d'effondrement au cours de la prochaine décennie que le scénario initial de statu quo de l'exécution standard de LtG. Le principal effet de la mise à jour du recalibrage est d'augmenter les pics de la plupart des variables et de les déplacer de quelques années dans le futur. Les paramètres présentant les changements relatifs les plus importants sont ceux liés à la durée de vie du capital industriel, au délai de transmission de la pollution et au temps de développement des terrains urbains et industriels.
Quelques extraits de l'article : Le premier scénario, et probablement le plus connu, est appelé « scénario standard » ou « scénario du statu quo » (BAU). Il montre une dynamique de croissance exponentielle du système et conduit à un dépassement et à un effondrement déclenchés par l'épuisement des ressources non renouvelables.
Le modèle World3 comprend les cinq secteurs interdépendants suivants :
Population
Capital
Agriculture
Ressources non renouvelables
Pollution.
État de la situation mondiale - BAU et recalibrage23 (2023)
FIGURE 3. Recalibration23, amélioration par rapport au scénario BAU.
La figure 3 montre non seulement les résultats de variables spécifiques de recalibrage23, mais aussi les valeurs des mêmes variables issues du scénario de référence 2005 (BAU). Les trajectoires approximatives des ressources non renouvelables, de la production industrielle et de l'alimentation ne diffèrent pas beaucoup du scénario BAU. Seuls le moment et la hauteur des pics sont différents. Le pic alimentaire est plus élevé et se déplace de quelques années vers l'avenir. On observe un comportement similaire dans la courbe industrielle : le pic augmente, mais se déplace vers le passé. La valeur initiale des ressources est plus élevée que dans le scénario BAU, mais la courbe du graphique suit toujours la même trajectoire et la valeur approximative de cette variable pour aujourd'hui est presque la même. La courbe démographique est presque identique à celle du scénario BAU. La plus grande différence réside dans la trajectoire de la pollution. Le pic de la courbe diminue et se déplace d'environ 50 ans dans le futur. Une explication plus détaillée des variables qui contribuent à cette modification de la trajectoire est fournie à la section 4.
Comparaison des scénarios démographiques. (2023)
FIGURE 4. Comparaison des scénarios démographiques.
Figure 4 : Les données empiriques, les scénarios « BAU » et « BAU2 » initiaux, ainsi que le nouveau scénario « Recalibration23 » sont représentés graphiquement pour la variation de population.
Ce graphique de la population vient compléter l'article avec l'interview de Meadows, "Peaceful collapse" (dans la partie "contenu sensible").
5 CONCLUSION
Dans cet article, le modèle World3 de l'étude LtG a été recalibré afin de refléter le comportement des données empiriques au cours des 50 dernières années. À cette fin, 35 paramètres du modèle ont été sélectionnés et optimisés pour un ensemble sélectionné de huit ensembles de données empiriques différents qui reflètent le plus fidèlement l'évolution historique. Un algorithme a été développé afin de minimiser le NRMSD agrégé entre les données du modèle et les données empiriques à l'aide d'une méthode itérative. Un nouveau scénario avec l'ensemble de paramètres amélioré a été présenté. Parmi les scénarios LtG originaux de 1972, le scénario BAU correspond le mieux à ces paramètres et à l'évolution des variables. À l'instar du scénario BAU de la publication LtG, le nouveau scénario Recalibration23 reflète le dépassement et l'effondrement dus à la rareté des ressources. Cependant, les pics de certaines variables sont relevés et partiellement décalés dans le futur.
Parmi les scénarios LtG originaux de 1972, le scénario BAU correspond le mieux à ces paramètres et à l'évolution des variables. À l'instar du scénario BAU de la publication LtG, le nouveau scénario Recalibration23 reflète le dépassement et l'effondrement dus à la rareté des ressources.
Cette étude annonce donc que le pic de pollution est reporté d'environ 50 ans et que l'effondrement le plus imminent est celui dû à la croissance exponentielle : consommer toujours plus de ressources, dans un monde limité, la planète.